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PARADOX-SAL


LES REINES DE LA HOUSE

Par Claire Moralee


Avec Queen Blood, Ousmane Sy alias Babson poursuit sa démarche d’amener une danse de club, la House (et plus particulièrement l’Afro House) sur scène. Cette fois il interroge et célèbre la féminité, incarnée par 7 danseuses, 7 personnalités fortes et singulières au service d’un collectif complice et à l’unisson.

Pendant la dizaine de minutes où le public s’installe, les danseuses s’échauffent sur scène en improvisant sur la musique, échangent des paroles, plaisantent et se stimulent mutuellement en formant des duos éphémères au gré de leurs déambulations. Les fondements du spectacle sont déjà posés: authenticité, cohésion, et plaisir du jeu à partir de la musique. Le groupe est métissé, à dominante afro. En réalité les origines des danseuses sont variées (Australie, Cameroun, Ile-de-France, Guadeloupe, Corse) et leur formation technique initiale également (hype, hip hop, africaine, krump, floor work, locking). Elles se singularisent physiquement par leur gabarit et leur coiffure.

Quand le spectacle commence, les danseuses passent en mode warrior, alignées en fond de scène face public dans une attitude de défi. C’est parti pour une succession de tableaux hyper pêchus sur des musiques électroniques de House et de tableaux plus sensibles sur des musiques acoustiques. Dans tous les tableaux, la chorégraphie colle au plus près de la musique : tout en marquant le beat les danseuses exploitent et mettent en relief les accents du rythme et de la mélodie, les silences, les ruptures et les reprises… A travers les corps le spectateur peut visualiser et vivre la musique. Ce rapport de jeu avec la musique est d’ailleurs propre à la danse House qui est une danse de club. Dans ce spectacle c’est plus précisément l’Afro House qui est représentée. L’ Afro House vient d’une fusion, dans la danse et dans la musique, de la House américaine et de danses traditionnelles africaines qui lui donnent une rondeur, un caractère et un groove particuliers.

Dans les tableaux de House music, les danseuses nous transportent par leur énergie et leur virtuosité technique mêlant puissance et élégance. La chorégraphie étant née des propositions propres aux danseuses, ces tableaux alternent solos, duos, trios, etc., qui se font et se défont avec leurs va-et-vient sur scène. Les passages solos mettent en valeur leurs personnalités et leurs styles respectifs. Dans les déplacements les danseuses semblent parfois glisser voire voler sur scène. Leur rapidité et leur fluidité sont bluffantes. Cette précision dans l’espace rejoint l’extrême précision rythmique et la parfaite synchronisation des danseuses.

Des tableaux sur musique acoustique viennent calmer le jeu et ponctuer le déroulé des tableaux de House music. Changement complet d’atmosphère. Dans un premier tableau, les danseuses proposent une danse plus intime, habitée, sensuelle et très expressive. Le temps est suspendu, le spectateur envoûté. La fin du spectacle est marquée par un autre moment de grâce. Alors que 5 danseuses attendent immobiles sur le plateau central, ce sont les bords de scène qui accueillent un étonnant duo, dans un renversement scénographique. Pendant qu’une danseuse se lance dans une interprétation très sensible de la musique, l’autre ne danse pas mais la regarde, la suit en miroir, l’accompagne de loin comme une âme sœur ou un ange gardien. Un moment de pur plaisir, presque enfantin.

Finalement, Queen Blood est un spectacle émouvant et d’une grande virtuosité ; le spectateur ne peut qu’être émerveillé devant tant de puissance et de grâce.

Le 20/10/2019 au Théâtre de Laval, soyez au rdv !


Queen Blood- Ousmane Sy (création 2019) from CCNRB on Vimeo.


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